Histoire
La Conquête des Polders
Ces terres d’origine marine, constituées de sédiments appelés tangue, ont depuis le 10ème siècle fait l’objet de convoitise de la part de la population locale. De nombreuses tentatives d’assèchement furent entreprises dès 1577, toutes vouées à l’échec. La dernière en 1856, mise en oeuvre par la Société Mosselman et Donon, qui devient la Compagnie des Polders de l’Ouest, connut une fin plus favorable. La concession fut signée le 21 juillet 1856 pour 99 ans par l’Empereur Napoléon III.
La Compagnie des Polders de l’Ouest dut construire de nombreux corps de ferme. Et surtout pourvoir à l’adduction d’eau : pour ceci trois réservoirs alimentent les fermes à l’aide d’un réseau de 15 km de tuyaux de fonte. Le grand réservoir contenant 10 000 m3 d’eau est situé à 30 m au dessus des polders. Dans cette conquête s’illustrent deux agriculteurs : le Comte Charles Doynel de Quincey et son successeur Mr Julien Touzard (1831-1915) dont la Ferme des Quatre-Salines s’étendait sur 400 hectares. Au delà de la dernière digue s’étendent les herbus où paissent les fameux moutons de prés-salés. Cet admirable paysage peut encore subir les assauts de la mer ; la dernière grande inondation remonte au 28 février 1869.
Le Village des Quatre Salines
Ce village porte le nom des salines qui occupaient le littoral de la commune jusqu’à la fin du 18ème siècle.
Au milieu du 19ème siècle, la mer venait encore jusqu’au pied de ce village protégé par la digue médiévale, dite de la Duchesse Anne.Le site a été exploité bien avant notre ère par les populations locales en utilisant successivement deux techniques d’ extraction du sel.
La plus ancienne dite du briquetage consistait à obtenir une saumure très concentrée, pour être ensuite cristallisée par chauffage et évaporation du surplus d’ eau, de façon à obtenir un pain de sel d’ environ 3 kg. Le moule contenant ce pain était ensuite brisé pour récupérer le sel.
La technique dite de lavage des sables consistait quant à elle à recueillir le sable salé des grèves. Celui-ci était disposé dans des caisses, en couches recouvertes de paille. Puis il était ensuite lessivé par l’ eau de mer qui filtrée par le sable, devenait une liqueur saline très concentrée. On la faisait évaporer dans de petits bassins en plomb, en les chauffant au bois. La masse saline obtenue était mise dans des paniers suspendus au dessus des fours. Le sel obtenu était très blanc, de consistance neigeuse. Après l’ opération de lavage, les sables constituent des amas considérables que l’ on désigne sous le nom de Mondrins.
Le village des Quatre Salines fut, jusqu’au 19ème siècle, le siège d’ un poste des Douanes Royales et Impériales ainsi que d’ un bureau de sel.
Le Corps de Garde
Il faisait partie d’un ensemble de 46 corps de garde situés entre Saint-Pol-de-Léon dans le Finistère et le Couesnon. Leur rôle était de prévenir tout débarquement d’ennemis sur nos côtes.
Le bâtiment comprend une salle de garde et une prison. Sa date de construction est incertaine. On sait seulement qu’il a été édifié au frais de la paroisse et qu’en 1718 il aurait eu besoin de réparations.
Il abritait un détachement de miliciens garde-côtes recrutés dans la population locale par tirage au sort. Les bons numéros constituaient la compagnie de la Paroisse ou Compagnie du Guet. Les mauvais numéros formaient la Compagnie détachée qui devait, en cas de conflit, prendre position à la Varde près de Cancale
Chaque compagnie comprenait 1 Capitaine, 1 Lieutenant, 1 Enseigne (cet encadrement appartenait à la noblesse locale) et de 2 sergents, 3 caporaux, 3 ampessades (aides caporaux), 1 tambour et 41 fusiliers ou canonniers.
Au cours de la guerre de 7 ans (1758), la compagnie détachée de Roz eut son capitaine et son lieutenant tués et 5 miliciens fait prisonniers. Néanmoins les Anglais furent rejetés à la mer.
Le Château de Launay
Le château de Launay-Morel abritait le Seigneur de la paroisse qui détenait le droit de haute justice. Il dépendait lui-même du Comte de Combourg. Le site fut occupé depuis le 14ème siècle par les familles Chantegrue, Des Li, de Saint-Gilles, de Marcillé, et Gouyon de Vaucouleur.
Le château était ceinturé de douves formant un rectangle de 165 mètres sur 90. A l’intérieur de ce périmètre s’inscrivait un corps de logis central, flanqué à l’Ouest d’ un bâtiment à usage de boulangerie, et à l’Est d’ un bâtiment identique à usage d’ écurie. Ces trois bâtiments encadraient une cour dallée de plus de 1200 m². La chapelle était située au Sud, en dehors des douves, devant l’entrée de la cour d’honneur.
De ce magnifique ensemble, seul subsiste le colombier, construit en pierres, de forme circulaire au diamètre extérieur de 9 mètres et haut d’environ 9 mètres. Il comporte 813 bouliers ou logements à pigeons. Ceci permet d’ évaluer la superficie de la seigneurie. La coutume de Bretagne autorise, en effet, un boulier par jour de terre, soit deux bouliers pour environ un hectare. La seigneurie de Launay-Morel s’étendait donc sur plus de 400 hectares.
Le Manoir de la Rue
Le manoir porte la date de 1574. Il fut édifié par Jean Ybert dont la fille épousa Georges Simon. Plusieurs générations de Simon se sont succédées jusqu’en 1699 dont Françoise Thérèse Simon épouse de Julien de Brumes de Montlouet. L’un de leurs enfants, François (1712-1765) fut vicaire Général de Dol puis évêque de Saint-Omer.
L’entrée du manoir, au sud, est un important porche bâti en grand appareil, comporte une grande voûte et un portillon du même style. Cet ensemble a malheureusement été mutilé dans sa partie haute.
Le logis comprend d’une part une vaste salle, dallée de pierres plates, à usage de cuisine avec four et grande cheminée; d’autre part, une grande salle commune avec des poutres apparentes, portes et fenêtres à l’est.
Le roman de Paul Féval, La Fée des Grèves s’y déroule en partie.
Les Herbus et les moutons Prés-Salés
Actuellement les herbus qui partent de la Chapelle Saint-Anne à Saint Broladre jusqu’aux berges du Couesnon, constituent 1400 hectares d’un seul tenant (plus de la moitié se trouve sur la commune de Roz-sur-Couesnon), formant la plus importante unité de Prés-Salés de toute la Baie du Mont Saint-Michel.
La montée périodique des marées sur les herbus favorise la présence d’une flore adaptée à la présence du sel. Sur les herbus de Roz-sur-Couesnon une trentaine d’espèces se répartissent selon leur degré d’adaptation à l’ influence marine. Parmi ces espèces caractéristiques des prés-salés figurent la spartine, les salicornes, la puccinellie, l’obione, la soude…
La couverture végétale qui recouvre les herbus est fortement marquée par le pâturage du célèbre mouton pré-salé. Une tradition d’ élevage que pratiquaient déjà les moines de l’abbaye du Mont Saint-Michel. La race grévine « tête et pattes noires » est le mouton de référence des prés-salés qui en font une race rustique adaptée au milieu qu’elle pâture.
A Roz-sur-Couesnon, le cheptel de 3600 brebis qui paissent sur les herbus, constitue le plus grand rassemblement de Prés-Salés de Bretagne. Pour obtenir l’appellation Agneau Prés-Salés, il leur faut 250 jours de pâturage sur les herbus par an.